« Galilée,
martyr de la science »
D'après
la légende, Galilée a inventé le télescope, ce qui lui a permis
de découvrir les montagnes de la Lune, les tâches solaires, quatre lunes de Jupiter et les changements de taille apparente des
croissants de Vénus. Il a inventé la méthode expérimentale et à
posé les bases de la mécanique qui amèneront aux découvertes de
Newton. Galilée est l'un des grands martyrs de la science parce
qu'il a été emprisonné et torturé par l'inquisition comme
hérétique, et forcé de renoncer publiquement à sa théorie
héliocentrique du système solaire1.
En sortant du procès, il aurait marmonné dans sa barbe : « Et
pourtant, elle tourne ! » Il est le plus célèbre
chevalier de la lutte entre la raison et le dogme de l'Eglise.
Ce
qui fait la différence entre un grand scientifique et un mythe, ce
sont les choix éditoriaux des biographes, qui changent en fonction
des besoins des époques. Et si on nous avait transmis une autre
légende ?
Galilée est un bon vivant, sensuel et intuitif. Il fait sa première découverte à 19 ans : assis dans une église,
il observe les mouvements de balancier des encensoirs. N'ayant pas de
montre, il utilise les battements de son cœur pour mesurer le temps
mis par ces objets pour faire un aller-retour, et découvre que ce
temps ne dépend pas de la masse de l'encensoir, mais de la longueur
de la chaîne à laquelle il est suspendu. Etonnement, il n'utilisera
jamais cette découverte pour mesurer le temps dans ses expériences
de physique. Le jeune Galilée, comme la
grande majorité des scientifiques de son époque, prétend que le
Soleil et les planètes tournent autour de la Terre, et que le livre
de Copernic (qui affirme que les planètes tournent autour du Soleil)
est une hérésie. De toutes façons, ce livre est plein de
contradictions et presque illisible : l'Eglise a mis 73 ans pour
décider de le mettre à l'index.
Galilée
est ambitieux, il a une très haute opinion de lui même. Il invente pourtant une théorie farfelue qui explique qu'il n'y a qu'une marée par jour et affirme que les comètes n'existent pas. Il entend
parler de l'invention d'une longue-vue en Hollande. Il décide d'en
construire une, mais ne maîtrisant pas bien les règles de
l'optique, il lui faut en construire une soixantaine pour en avoir
quelques unes qui fonctionnent. Il parvient à améliorer le
grossissement, et comme l'Italie bénéficie d'un ciel clément, il
la tourne vers le ciel étoilé.
La
concurrence est sérieuse. L'opticien Thomas Harriot dessine la
surface de la lune quelques mois avant lui (1609) et découvre les
tâches solaires en premier (1610)2 mais
heureusement, il ne publie pas ses résultats. Galilée est très
irrité quand le Jésuite Christoph Scheiner, lui, publie son
observation des tâches (1611)3.
Ce
qui n'empêche pas Galilée d'affirmer: "C'est à moi, et à moi seul, qu'il a été donné de découvrir toutes les nouveautés célestes, et rien aux autres." Il a 45 ans quand il devient célèbre pour ses observations astronomiques, et occupera ses vingt prochaines années à se faire de la publicité pour conserver sa notoriété.
En mécanique, n'ayant que peu d'outils mathématiques à sa disposition, il ne peut décrire que des phénomènes très simples, or le monde a le mauvais goût d'être affreusement compliqué. Eprouvant des difficultés à rendre compte des effets des forces de friction, qui sont partout autour de nous, il se limite aux rares situations où elles sont négligeables. C'est pourquoi il passe une grande partie de sa vie à faire rouler des boules sur des rails inclinés. Ses théories ayant plus d'importances pour lui que les faits observés, il n'aime pas les expériences qui contredisaient ses idées. Il élimine les résultats en désaccord avec ses théories, et ne laisse que peu de relevés expérimentaux à la postérité. Il extrapole ses observations sur les boules en imaginant quelqu'un qui lâche des boulets de canon depuis le haut de la tour de Pise. Il affirme que deux boulets de masse différente arrivent au sol en même temps. Il est tellement sûr de lui qu'il ne fait pas l'expérience.
Un jour, Galilée reçoit un livre d'un dénommé Kepler qui a prouvé par des calculs d'une grande complexité que Copernic a raison : la Terre tourne autour du Soleil. Ayant acquis une certaine stature en tant que professeur à l'université de Padoue, puis de Premier Mathématicien à l'université de Pise, Galilée décide de s'emparer de cette théorie. Il n'a pas trop confiance en Kepler qui parle trop d'astrologie (Kepler imagine même que la Lune pourrait influencer les marées!). Galilée est friand de sujets qui déclenchent des joutes oratoires épicées avec les jésuites, ces « pygmées mentaux » qui osent se croire à son niveau. Il s'est permis d'écrire un livre où il tourne en ridicule Orazio Grassi, l'un des plus grands savants de la confrérie, qui pour se venger enverra une lettre anonyme pour dénoncer Galilée à l'inquisition. La théorie héliocentrique de Copernic est rejetée par l'Eglise, mais Galilée a confiance dans l'admiration de ses contemporains, en particulier du Pape Urbain VIII, qui lui conseille : « Si tu écris un livre, présente ta théorie comme une parmi d'autres, sinon je ne pourrai pas te soutenir. »
Galilée écrit alors son livre le plus connu4, dans lequel il fait passer ses contradicteurs pour des imbéciles, et égratigne le Pape. Trop c'est trop, ses amis ne peuvent plus le défendre. Les Jésuites, brillants scientifiques, qui ne sont pas convaincus par la théorie héliocentrique, lui demandent des comptes. Galilée est embêté, il n'a pas de preuve scientifique du mouvement de la Terre autour du Soleil. Les seuls arguments solides sont dans le livre de Kepler, mais Galilée est trop fier pour lui donner raison. Il prétendra toute sa vie ne pas avoir pas lu ce livre, pourtant il le conservait dans sa bibliothèque. Un autre problème de taille, c'est que si la Terre orbite autour du soleil, on devrait voir les étoiles former de petits anneaux dans le ciel. Or il n'a absolument rien vu avec son télescope.
C'est alors que la situation politique en Italie se tend, il devient dangereux pour le Pape d'apparaitre faible. Un procès contre l'héliocentrisme est une bonne opération de communication et un moyen de faire taire un fauteur de trouble arrogant qui a irrité les Jésuites. Galilée n'est pas torturé, il n'est pas enfermé dans un cachot humide mais à la Villa Médicis. Il a beau être orgueilleux, en sortant de son procès il n'a pas risqué le bûcher pour le plaisir de marmonner : « Et pourtant, elle tourne !». Il est condamné à être assigné à résidence, avec interdiction de publier des livres; ce qui ne l'empêchera pas de publier son dernier ouvrage en Hollande5. Sa magnifique villa domine Florence. Il pourrait y observer le ciel depuis la terrasse, mais i1 a 70 ans, est perclus de rhumatismes, et perdra bientôt la vue.
Ce
qui a été distordu au fil des siècles, ce n'est pas la grandeur
des découvertes de Galilée, mais la dimension humaine de sa
biographie : les erreurs commises par le grand homme sont
passées sous silence et la stature scientifique de ses détracteurs
n'est pas mentionnée. « L'affaire Galilée » ne parle
pas de physique ni d'astronomie. C'est une mythologie amplifiée au
19e
siècle, sans recherche historiques poussées, pour alimenter les
polémiques grandissantes entre religieux et « scientifiques »
(le terme venait alors d'être inventé). 6
Le
dernier livre de Galilée est une œuvre magistrale qui ouvre la voie
aux théories de Newton. Quant au livre qui l'a fait condamner, le Dialogue sur les
deux grands systèmes du monde, il est révolutionnaire parce que Galilée l'a écrit en italien pour le
rendre accessible au plus grand nombre, brisant ainsi une longue
tradition élitiste de rédaction en latin. Au lieu d'un traité de
mécanique alourdi de démonstrations et de définitions, il a opté
pour une œuvre littéraire humoristique et imagée, où la nature
occupe la place centrale. Le procès devant l'inquisition, en
retentissant à travers toute l'Europe, a grandement contribué à la
notoriété de l'ouvrage et à sa diffusion.
Galilée a inventé la vulgarisation scientifique.
« La
science est objective »
Depuis
Galilée la science, dite moderne, est basée sur l'expérimentation.
Pour être validée, une expérience scientifique doit être
reproductible, dans le cadre d'un protocole expérimental précis. En
ce sens, la science est objective.
Comme le dit le proverbe : « quand on a un marteau dans la main, on ne voit plus que des clous». Des peintres qui n'auraient que du bleu sur leur palette pourraient être tentés de ne représenter que la mer et le ciel. Le scientifique ne maîtrise, au mieux, que les outils de son temps. A l'école, on nous enseigne aujourd'hui les fonctions dérivables, idéales pour décrire les phénomènes qui évoluent en douceur. Elles ne permettent pas de décrire, par exemple, les formes rocailleuses de la Côte de Bretagne, ou les replis de la paroi intestinale. Les outils mathématiques cadrent les directions de la recherche. L'invention d'un nouvel outil mathématique va souvent de pair avec la découverte d'une nouvelle théorie. En voici quelques exemples : la géométrie des espaces courbes de Riemann et la relativité générale d'Einstein, les matrices et l'algèbre non commutative et la mécanique quantique, la théorie des groupes et les lois de conservation, l'algèbre de Lie et la théorie des champs de jauge. Nous sommes aussi limités par notre langage, qui s'est développé par l'intermédiaire des sens, dans le monde organique qui nous entoure. Nous ne pouvons par exemple pas connaître les quantités physiques qui importent dans l'infiniment petit et tentons de décrire ce monde à l'aide de quantités adaptées à notre échelle, comme la position ou l'énergie.
La recherche est dépendante de la technologie, et par conséquent de ceux qui attribuent les fonds, voire des financements militaires. Les élèves de Terminale apprennent la balistique, développée pour prédire la trajectoire des boulets de canon. Il arrive que les décisions prises par un chercheur aient pour motivation principale la sauvegarde de son emploi. C'est la raison pour laquelle il y a, par exemple, très peu de recherches indépendantes sur les conséquences à long terme de la consommation d'OGM.
Pour observer le réel, nous n'avons que nos sens, et des instruments de mesure conçus par notre intellect. Nous les utilisons de pair. Chacun à ses limitations, mais nous ne pouvons pas faire mieux.
Au-delà
des aspects techniques, pécuniaires et politique, un scientifique
fait toujours le choix d'où il porte son regard. En faisant ce
choix, il devient aveugle aux phénomènes derrière son dos. Sa
décision est informée par un contexte culturel, personnel, éthique.
Pour faire une découverte, il fait appel à son intuition et à son
imagination. Quant à la phase de raisonnement, elle peut être
influencée par les émotions, par le corps, par l'environnement.
Un-e scientifique qui a des exigences d'objectivité doit prendre conscience des biais inhérents au cadre de sa recherche, et devrait faire preuve d'humilité quand il énonce de nouvelles vérités. Sinon, il devient une proie facile pour les chevaliers de l'obscurantisme et de l'anti-intellectualisme. Pourtant, les études scientifiques ne nous proposent jamais de réfléchir sur l'objectivité scientifique.
«Pour
faire des sciences, il faut être bon en mathématiques.»
Exceller
en mathématiques ouvre les portes des meilleures écoles
scientifiques. Pourtant Niels Bohr et Faraday n'étaient pas réputés
pour leur dextérité à manier les équations. Les mathématiques
sont le langage de prédilection des sciences dures, mais les aspects
techniques sont de plus en plus pris en charge par des ordinateurs
qui peuvent désormais faire du calcul symbolique, c'est-à-dire
résoudre presque tous les problèmes que l'on trouve dans un manuel
de math de Terminale ES, et plus. Déléguer ce travail aux machines
signifie libérer le cerveau pour d'autres tâches, par exemple de
synthèse ou de création. De nos jours, très peu de chercheurs font
encore des calculs à la main. C'est pourtant ce qui est enseigné
dans nos écoles. Elles ont abandonné la règle à calcul pour la
calculette, mais le calcul d'intégrales se fait encore avec un
papier et un crayon.
« La
science est une création occidentale »
Certains
ont tenté de prouver que la science n'est pas née en Occident par
hasard, qu'un concours de circonstances a permis son essor dans la
Grèce Antique7.
Pendant mon cursus en science, il ne fût question que de science
occidentale. Enseignant l'astronomie à auditoire d'origine
chinoise, indienne, arabe et perse, je ne peux pas me permettre de
montrer le ciel et ses étoiles aux noms arabes
(Altaïr, Deneb, Bételgeuse, Aldébaran),
et passer sous silence l'apport de l'Empire Musulman, de la Perse
Ancienne, de l'Inde et des astronomes Chinois. Mes élèves
pourraient se plaindre pour discrimination auprès de ma hiérarchie.
Fascinée par Omar Khayyam, astronome de Samarkand, je me limiterai à rappeler quelques faits sur l'Empire Musulman, qui s'étendait de l'Espagne au Pakistan. Au 9e siècle, Bagdad devient une capitale scientifique effervescente, avec un observatoire nouvellement construit où les astronomes reprennent les travaux d'Hipparque et perfectionnent son outil d'observation, l'astrolabe, qui n'atteindra l'Europe qu'à la veille de l'an 1000. De grands observatoires sont construits à Istanbul, Téhéran et Samarkand. Vers l'an 900, Bagdad et Cordoue sont les deux plus grandes villes du monde.
L'étendue de l'Empire permit de créer une confluence entre les savoirs de l'Antiquité (les Arabes avaient envahi la ville d'Alexandrie), de l'Ancienne Perse, de l'Inde et de la Chine. « La maison de la sagesse » de Bagdad invente le concept de centre de recherche scientifique international. Les érudits entreprennent un travail titanesque de traduction en Arabe de textes sanskrits, perses et en grecs. Ils conservent le livre le plus important de l'astronomie antique, l'Almageste de Ptolémée, qui a disparut d'Europe. La Renaissance leur doit les chiffres indiens, en particulier le zéro, absent des chiffres romains, et le système décimal. Le mathématicien Al-Khwarismi transmettra un traité d'algèbre sur la résolution d'équations, son nom deviendra le mot « algorithme ». L'Empire Islamique resta à la pointe des sciences pendant cinq cent ans (Cordoue sera reprise par les Européens en 1236 et Bagdad sera détruite en 1258).
Au 11e siècle, Avicenne écrit le canon de la médecine qui sera étudié dans les universités Européennes jusqu'à la Renaissance. A la même époque, Alhazen, considéré par certains comme le Newton de l'Empire Musulman, pose les bases de l'optique géométrique, étudie la réflexion et la réfraction de la lumière, établit des liens entre mathématiques et physique, introduit le concept d'expérience et de preuve logique. Ses travaux d'optique sur les fonctionnement de l'oeil furent utilisés au 13e siècle par Roger Bacon, puis par Kepler.
L’essoufflement des icônes
« La
Nature et ses lois gisaient dans la nuit.
Alors
Dieu dit « que Newton soit ! » et la lumière fut. »
Alexander
Pope
C'est au lycée qu'on apprend les lois
de Newton. Quand ma professeure expliquait qu'Isaac Newton nous
apporta les lois de la dynamique et de la gravitation universelle, je
le voyais, avec son sourire sérieux et ses cheveux ondulants, comme
un Moïse du progrès recevant les quatre commandements. Il était né
avec une intelligence supérieure, il était l'être élu. On aurait
pu croire que sans lui la dynamique n'aurait pas vu le jour.
Imaginons une historienne qui voit l'histoire des sciences comme une
ruche effervescente plutôt que ponctuée d'êtres exceptionnels
frappés d'inspiration divine. Elle s'intéresse à la découverte de
la loi fondamentale de la dynamique (2e loi de Newton).
Après quelques recherches, voici ce qu'elle écrit :
Le
concept précurseur de la quantité de mouvement et de l'énergie
cinétique s'appelait « impetus ». Les premiers travaux
sur l'impetus datent de Jean Philopon (6e
siècle). Le concept est ensuite étudié au 11e
siècle par par Marchia, Buridan, Saxony et Oresme au 14e
siècle. L'impetus est alors vu comme une force interne acquise par
un objet en mouvement, qui perpétue le mouvement. Au
16e
siècle, on s'intéresse beaucoup aux trajectoires de boulets de
canon. Benedetti affirme qu'un objet qui a acquis de l'impetus sous
l'action d'une force extérieure à une tendance naturelle a se
mouvoir en ligne droite. Peu de temps après, Galilée énonce qu'en
l'absence de frottements, un objet se déplaçant sur une surface
horizontale se déplace en ligne droite à vitesse constante,
à moins qu'il soit perturbé par une force extérieure (pour faire
simple, pensez à une boule de bowling qui traverse un
couloir carrelé). Newton,
lui, affirme que tout corps persévère dans son état de repos ou de
mouvement uniforme en ligne droite si aucune force extérieure n'agit
sur lui. Pour Newton, il y a deux types de forces :
vis insita (force
interne) et
vis impressa (force
imprimée, ou force extérieure). Il faudra attendre le 18e
siècle pour que d'Alembert et Euler rejettent le concept de force
interne. La fameuse équation ,
connue comme la « deuxième loi de Newton » fut écrite
dans sa forme actuelle par Euler8
().
Au
cours de ses recherches, l'historienne à la surprise d'apprendre que
Newton étudiait la Bible et l'alchimie au moins autant que la
physique. Du 12e au 17e siècle, l'Europe était
le centre névralgique de la recherche de la pierre philosophale et
de l'élixir de longue vie. Newton possédait la meilleure collection
de livres d'alchimie du continent et partageait ses idées avec le
grand Robert Boyle, considéré aujourd'hui comme l'un des pères de
la chimie moderne. Sans cette passion pour l'occulte, Newton n'aurait
peut être jamais imaginé que les corps comme la Terre et le Soleil
peuvent s'attirent à distance, sans se toucher.
Dieu et la Terra Madre
Même
si l'on est athée depuis plusieurs générations, notre approche de
la nature est influencée par un imaginaire collectif imprégné de
religion chrétienne. Nous fûmes créé-es par un Dieu père qui
n'avait pas de femme. La Terre est un cadeau venu d'en haut. Étudier
les secrets de la Nature est une forme de révérence envers le
Créateur. Si l'on pense, comme Galilée, que le livre de la nature
est écrit en caractères mathématiques, Dieu est le Mathématicien
suprême qui a créé la matière et l'a mise en mouvement.
Le
mot « matière » vient du mot « mater » :
la mère. Imaginons un instant comment le progrès scientifique et
son exploitation par des intérêts privés auraient évolués si
nous avions grandi dans une religion non révélée. Les enfants de
Sumer étaient bercés des légendes de la déesse de l'eau, Nammu,
mère du dieu du ciel An et de la déesse de la Terre, Ki. Pour les
Egyptiens, il y a 5000 ans, les humains et le Nil avaient été créés
par la collaboration de la déesse vautour Nekhbet avec la déesse
cobra Wadjet. Nous pourrions être imprégnés d'une histoire de la
Terra Madre, un utérus nourricier à partager avec d'autres espèces,
dont nous ne sortirons pas. Et si, au lieu de nous prouver que les
animaux n'ont pas d'âmes, pour ne pas encombrer le paradis, on nous
avait conté que tous les mammifères sont égaux en droit de
survivre ? Si notre culture voyait le temps comme une série de
cycles de destruction et de régénération, plutôt qu'une ligne,
une fuite en avant. Au Canada nous avons par exemple beaucoup à
apprendre des Peuples des Premières Nations.
Etonnement, le tournant de l'histoire des sciences en Europe, c'est la peste noire. Dix ans après le début de la guerre de cents ans9, dans un contexte de misère et de famine, la maladie emporte le tiers de la population. On incrimine les Juifs, ou la colère de Dieu. Dans cette atmosphère morbide, l'image de la « mère nature » fait place à la haine. L'épidémie marque une rupture dans la relation entre les humains et la nature. Leur quête sera désormais de la dominer pour s'en protéger, ils s'accorderont le droit de la piller. Le manque de main d'oeuvre stimulera l'innovation technologique (nouvelles charrues, essor de l'agriculture). La population ayant décliné, la terre abonde. En s'enrichissant, les gens acquerront plus d'éducation. Ce sera bientôt l'invention de l'imprimerie, suivie par le microscope et le télescope.10
----------------------
1
Système héliocentrique : les planètes tournent
autour du Soleil et non autour de la Terre.
2Les
tâches solaires étaient connues des Chinois depuis 16 siècles.
3Les
tâches solaires fûrent aussi observées la même année par David
and Johannes Fabricius.
4
Dialogue des deux grands systèmes du monde,
Galileé
5
Discours et démonstrations mathématiques concernant deux sciences
nouvelles, Galilée,
1638
6En
Europe, les courants politiques qui combattaient le pouvoir de
l'Eglise soutenaient la science et la technologie. En Amérique du
Nord, il s'agissait plutôt d'un sentiment anti-catholique orchestré
par les protestants. Voir par exemple les
textes de A.D. White (The Battle Fields of Science, 1869) et
J.W. Draper (History of the conflict between religion and
Science, 1874).
7Cromer,
1995.
8
Euler, Mechanica,
1750
9La
guerre commence en 1337.
10Imprimerie :
1454. Premiers microscopes : 1590.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire